Association de Sauvegarde du

CHATEAU DE GAVRAY

APRÈS LA GUERRE DE CENT ANS

La guerre de Cent Ans est achevée. Charles VII peut, légitimement, récompenser les artisans de sa victoire, et, parmi eux, le comte de Richemont, à qui il donne, sa vie durant « la ville, terre, seigneurie et vicomté de Gavray », par un acte du 24 novembre 1451 : 

 

« considerans les grands, notables, continuelz et prouffitables services que a faiz par longtemps à nous et à la chose publique de nostre royaume notre très chier et amé cousin le comte de Richemont (….) donnons (…) à sa vie seulement, les fruits prouffiz et revenus quelxconques de nos ville, terre, seigneurie et vicomté de Gavray, à iceulx avoir et prendre chacun an, à sa dicte vie durant , par les mains de notre vicomte d’illec et par les simples quittances d’icellui nostre cousin ou de son trésorier» , , fiefs, ausmones, gaiges d’offices, réparations de places et autres charges ordinaires premièrement paiez...». (1)

Arthur de Richemont

Ironie de l’histoire, Gavray est remis au propre petit-fils de Charles II de Navarre.

Cet acte est intéressant à plus d’un titre :

- pour la première fois de son histoire, Gavray est donné à un particulier. Arthur de Richemont a non seulement les revenus des terres du château mais également comme précisé plus loin dans le texte « peut pourvoir à la garde et cappitainerie….de Gavray ».
- et surprenant, il est fait mention de la « vicomté » de Gavray à deux reprises dans le texte et plus loin, une restriction est faite à son pouvoir :
 « il ne pourra nommer le vicomte quand le dit office sera vacant ».
Or, la vicomté de Gavray n’existe plus depuis la fin de la période ducale et dès 1472, il est bien attesté que Gavray fait partie de la vicomté de Coutances. On trouvera une vicomté à Gavray à partir de 1636.

La guerre est finie, mais une paix durable peut-elle s’établir ? La menace anglaise est toujours là. Charles VII exige la présence permanente de De Richemont en Normandie.

En 1459, le domaine de Gavray revenu à la couronne après la mort De Richemont voit des réparations effectuées. On sait, en effet, que Guillaume Collas, lieutenant et garde du chastel de Gavray, visite les réparations. (2)

C’est de Bretagne que va venir le danger. De 1465 à 1467, une guerre oppose Bretons et Normands, ce sera le dernier fait de guerre dans lequel le château joue un rôle.
Profitant de la lutte qui oppose la noblesse normande au pouvoir royal, François II, duc de Bretagne, occupe les places normandes. C’est la guerre civile.

 
  Vitrail des Cordeliers de Nantes : François II, Duc de Bretagne, en prières.
 

En octobre 1465, par les traités de Conflans et de Saint-Maur, Louis XI provoque la dissolution de la « Ligue du Bien public ». Son frère Charles, duc de Berry, soutenu par cette Ligue reçoit en apanage la Normandie.
En décembre 1465, François II irrité par l’attitude de Charles de Berry, se retourne vers Louis XI et accepte d’évacuer ses places normandes :

Charles de France.
Détail de l'enluminure de frontispice des Statuts de l'ordre de Saint-Michel par Jean Fouquet, Paris, BnF, département des manuscrits, vers 1470.

« Et fist rendre le dit duc de Bretaigne toutes les places de Caen, Bayeux, Saint Lo, Avranches, Coustances, Carentan, Vire, Valongnes, Gavrey, que ses gens avoient fait rendre au dit duc de Berry ». (3)

Peu de temps après, la coalition se reforme entre le duc de Bretagne, les nobles normands, Charles de Berry et Charles le Téméraire.
En octobre 1467, les troupes bretonnes envahissent la Normandie :

« vindrent les Bretons de par monseigneur de Berry entrer en Normandie, cuydans recouvrer la duchié (….). Les Bretons, qui estoient en garnison pour le roy a Baieux, a Caen, Carenten, Gavray et en plusieurs autres places, baillèrent et tindrent les dittes places pour le duc de Berry et non pour le roy ». (4)

Dans la lutte qui s’engage contre les Bretons, on trouve une espèce d’organisation secrète « les Galants de la Feuillée » dont l’origine remonterait à l’occupation anglaise. Dans une note au texte précédent, Siméon Luce rapporte que dans une lettre de rémission de Louis XI, datée de Beaugency en janvier 1467, Pierre Hossart, archer, lieutenant de Raymonnet de Boessi, capitaine du château de Gavray, demeurant au donjon du dit château prie :

« Raoulet le Foulon, « qui se disait estre ung des galans de la feuillie, qu’il n’entrast plus en sa dicte chambre ne aucuns des galans de la feuillie, desquelz avoit lors grant nombre au dit lieu de Gavray ».

L’année suivante, Louis XI reprend en main la Normandie et obtient de son frère la renonciation à son apanage.

Il semble qu’au XVIème siècle, une donation, bien attestée, en 1524 à Jacques d’Argouges ne l’ait fait sortir quelques temps du domaine royal. (5)
Le château abrite une garnison tout ce siècle, comme l’attestent les fouilles archéologiques menées dans les bâtiments résidentiels situés à l’est de l’enceinte.

En 1609, un capitaine, Jean Freschinet, archer des Gardes du corps et capitaine du château de Gavray demande l’autorisation de construire un moulin à papier sur la Sienne. (6)

Puis, il sera progressivement abandonné. Nous ne savons pas à quel moment il fût désaffecté, mais les fouilles ont révélé un certain nombre de monnaies du XVIIème siècle dans les couches de démolition.

 

En 1697, Louis XIV concède au comte de Toulouse, Louis-Alexandre de Bourbon, son fils adultérin avec la Marquise de Montespan, le domaine de Gavray qui comprenait :

-les étaux et les halles aux bouchers et au pain,

-le château,

-l’auditoire (part des amendes infligées par les officiers de la vicomté de Gavray),

-la juridiction avec la geôle et la prison,

-la lande Saint-Luc avec le droit de coutume (taxes de location de la lande et sans doute un péage à son entrée) à la foire Saint-Luc,

-la lande des Bains et celle des Noés.

Le Comte de Toulouse par Hyacinthe Rigaud en 1708  

La Révolution

En 1789, le cahier des doléances des habitants de Gavray fait état, notamment, de demandes :

-d’exécution d’une décision de l’Assemblée du Parlement de Coutances relative à la construction d’une route reliant Coutances à Gavray,

-relative à la construction d’une autre route vers Bricqueville-les-Salines pour le transport des engrais de mer.

 

Des pierres du château ont-elles servies à l'encaissement de ces voies lors de leur réalisation ?

Plus de détails voir : Les cahiers de doléances

 

Cession du château à la commune de Gavray 

 

Le 5 décembre 1832, la Compagnie du Cotentin exerçant les droits de la Maison d’Orléans cède gratuitement à la commune de Gavray, en raison de ses anciens droits d’usage, 106 ha 49 ares dont la butte du château.

L’incendie du vieux bourg 

Le 20 juillet 1876, un incendie se déclare dans le vieux bourg de Gavray. 140 maisons sont détruites, la Municipalité autorise les victimes à prélever des pierres du château pour leur reconstruction.


Notes et références :
(1) Bernard Beck « Gavray-Hambye » p. 79 – extrait de E. Cosneau « Le connétable Arthur de Richemont (1393-    1458) » appendice XCI p. 624-625
(2) « Gallia Regia (fr 26085 n°7251 et fr 26088 n°7323
(3) « Chronique du Mont Saint-Michel p. 79
(4) ibidem p.82-83 et note 1
(5) « Catalogue des actes de François Ier », Ordonnances des rois de France Paris 1905
(6) « Inventaire des arrêts du Conseil d’Etat », Inventaires et documents Paris 1893

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