Association de Sauvegarde du

CHATEAU DE GAVRAY

La Normandie et les successeurs de Saint Louis 1270 - 1314

Le début de cette période est marqué par un ralentissement de la croissance économique. Les premiers signes de la crise se manifestent au début du XIVe siècle. Nouveauté, les ressources royales deviennent insuffisantes d’où un alourdissement de la pression fiscale. La Normandie, qui contribue déjà fortement au budget royal, est fortement sollicitée entrainant mécontentement et révolte.

1270 – Le 25 août, Louis IX meurt de la peste ou de dysenterie sous les murailles de Tunis au cours de la huitième croisade. Philippe, fils de Louis IX et de Marguerite de Provence, lui succède à l’âge de 15 ans, sous le nom de Philippe III dit le Hardi.
1272 – Le 16 novembre, Henri III décède, son fils Edouard Ier lui succède et rend hommage à Philippe III.
1278 – Les habitants de Caen profitent d’une visite du roi pour manifester leur mécontentement face à l’augmentation des impôts. Ils sont condamnés par le Parlement de Paris à régler une amende au roi.
1280 - Les Normands sont très attachés à leurs privilèges, ils considèrent que, depuis Saint Louis, le roi et ses représentants ont tendance à les remettre en cause dans les domaines de la fiscalité et de la justice. L’irrégularité des réunions de l’Echiquier, tribunal supérieur et hautement politique, ne permet pas une justice rapide, ce d’autant que la méconnaissance de juges étrangers à la province des coutumes locales, entraine de fréquents compléments d’enquête, ralentissant la procédure, alors que l’application de « l’édit » peut déjà demander plusieurs années.
De plus, désormais, les jugements de l’Echiquier sont susceptibles d’appel par devant le Parlement de Paris, faisant perdre à la cour normande son statut de cour suprême et la province son autonomie judiciaire.
Sur le plan financier, les progrès de la fiscalité royale lui font perdre pratiquement son pouvoir de contrôle sur la perception des impôts.
1282 – Début de la préparation de la campagne d’Aragon, préfiguration d’un nouvel affrontement franco-anglais.
1283 – Philippe III exige un nouvel impôt des Rouennais. Arguant de leurs privilèges, ils refusent. Les représentants du roi n’hésitent pas à mettre en prison le maire, Thomas Naguet, et plusieurs bourgeois parmi les plus notables. Rouen paie mais le mécontentement grandi dans la population.

Philippe ne s’occupe pas vraiment de sa « belle province », occupé qu’il est à guerroyer, avec succès, dans le sud de la France.

  Couronnement de Philippe III
 

1285 – Le 5 octobre, Philippe, fils de Philippe III et d’Isabelle d’Aragon, à l’âge de 29 ans succède à son père, sous le nom de Philippe IV dit le Bel.
Dès le début de son règne, les relations entre les royaumes de France et d’Angleterre se dégradent. Les Normands jouent un rôle important dans le déclenchement des hostilités. Leur attitude est ambiguë, les marchands continuent à commercer activement avec les ports d’outre-manche. En concurrence avec les Bayonnais sur le trafic du vin de Gascogne, ils disposent d’une véritable flotte pouvant mener des opérations sur mer au nom du roi de France avec ou sans son consentement.
1286 – Le 5 juin, Edouard Ier prête hommage à Philippe IV le Bel.
1289 – Philippe le Bel expulse les juifs du Poitou qui refusaient de se convertir au catholicisme, leur imposant de porter sur leurs vêtements des signes distinctifs.
Le judaïsme occupe à l’époque une place importante en Normandie. Il y a beaucoup de « rues aux Juifs » dans de nombreuses villes : Granville, Coutances, Lisieux, Pont-Audemer, Fécamp, Bernay.
1290 – Première dévaluation monétaire.
1292 – Une véritable guerre navale oppose les Normands aux Bayonnais au large de la pointe Saint Mathieu (Finistère nord). Les Normands doivent faire amende honorable et jurent de garder la paix des mers. A peine sortis du port, quatre-vingts navires normands coulent de nombreux navires bayonnais,  Philippe le Bel condamne officiellement cette intervention.
1293 -  Au printemps, les Normands récidivent envoyant par le fond de nombreux navires anglais. Edouard Ier, roi d’Angleterre, mobilise la flotte des « Cinque Ports » qui surprend les Normands à leur retour et remporte cette fois la bataille.
1294 – Le 19 mai, Philippe le bel confisque à Edouard Ier son fief de Guyenne, la guerre commence officiellement, elle durera quatre ans de 1294 à 1298.
1295 – Nouvelle dévaluation et crise monétaire.
1297 – Début de la guerre de Flandre qui durera huit ans de 1297 à 1305.
Si les opérations terrestres de ces deux guerres, auxquels participent les vassaux normands, épargnent la Normandie, celle-ci contribue  pour une large part à leur financement.  En effet, au début de la guerre les caisses du royaume sont vides, Philippe le Bel utilisent tous les moyens possibles pour les remplir. Emprunt forcé sur les bourgeois, les prélats et les officiers, confiscation des biens des Lombards et des Juifs, dévaluation monétaire, décimes sur le clergé (avec l’accord du pape en 1295), instauration d’impôts nouveaux. Les Normands contribuent aux impôts nouveaux tout en continuant à payer les anciens.
1305 – Le 23 juin, le traité d’Athis met fin à la guerre de Flandre, les Flamands sont vaincus.    
L’étau fiscal se desserre très légèrement, mais le roi a toujours besoin d’argent.
1306 – Philippe le Bel promulgue un édit confisquant leurs biens et expulse environ 100 000 juifs.
1307 – Le vendredi 13 octobre, les templiers sont mis en prison et torturés pour faire admettre l’hérésie de leur ordre. En fait, Philippe ne supporte pas qu’une armée d’élite de chevaliers religieux soit si riche et dépende du pape sur le sol français.
1309 – Nouvelle dévaluation monétaire.
1314 – Jacques de Molay, maître de l’ordre, périt sur un bucher à Paris après avoir été déclaré « relaps » pour être revenu sur ses aveux arrachés sous la torture.

Statue de Philippe Le Bel à Saint Denis  

1314En avril, Isabelle de France, fille de Philippe le Bel et reine d’Angleterre, dénonce à Philippe ses trois brus qui étaient deux sœurs et leur cousine : Marguerite de Bourgogne, épouse de Louis de France et de Navarre, futur Louis X, Blanche de Bourgogne, femme de Charles futur Charles IV le Bel et Jeanne de Bourgogne, femme du futur Philippe V le Long dans ce qui devient le scandale d’état de la Tour de Nesle. Marguerite et Blanche sont accusées d’avoir trompé leurs maris avec les frères Philippe et Gauthier d’Aunay, tous deux chevaliers de l’hôtel royal avec la complaisance de Jeanne. Une enquête est diligentée et les deux frères avouent, sous la torture, entretenir des relations adultérines avec deux des belles-filles du roi. Les deux amants sont jugés et condamnés pour crime de lèse-majesté. Ils sont exécutés sur le champ en place publique, dépecés vivants, leur sexe tranché et donné aux chiens, finalement décapités, leur corps est trainé et pendu par les aisselles au gibet. Une telle cruauté est la conséquence de l’affront fait à la famille royale et l’atteinte aux institutions du royaume. En effet, qu’elle pourra être la légitimité et l’autorité d’un souverain dont on peut mettre en doute la paternité royale ?
Le châtiment réservé à Marguerite et Blanche de Bourgogne est exemplaire. Marguerite est condamnée à être tondue et conduite dans un chariot couvert de draps noirs à Château-Gaillard où elle meurt en 1315.
Blanche est aussi tondue mais bénéficie d’un traitement de faveur. Elle est d’abord emprisonnée pendant sept ans dont quelques temps au château de Gavray, puis obtient l’autorisation de prendre le voile. Elle devient reine de France en prison le 21 février 1322 avant que son mariage ne soit annulé le 19 mai par le pape Jean XXII.
Jeanne, pour avoir gardé le secret, est enfermée à Dourdan. Soutenue par sa mère Mahaut d’Artois, elle se réconcilie avec son mari devenu Philippe V le Long et devient reine de France en 1317.
Le 29 novembre, Philippe IV le Bel décède à la suite d’une chute de cheval.
Sous son règne, le royaume de France atteint l’apogée de sa puissance médiévale, il est le pays le plus peuplé de la chrétienté avec treize millions d’habitants et connait une grande prospérité économique. Cependant, plusieurs procès et scandales, privés ou politiques  entoure Philippe d’une aura douteuse. Roi énigmatique, est-il l’instigateur de la politique royale ou bien un roi indécis dirigé par ses conseillers et ministres. Sous son règne, la France abandonne ses traditions féodales pour devenir un état avec une administration moderne. Toutefois, la centralisation monarchique mécontente les grands seigneurs, des nouveaux impôts dressent les bourgeois contre le pouvoir, et les paysans accablés de taxes diverses se révoltent.
1314 – Le 29 novembre, Louis, âgé de 25 ans, fils de Philippe IV et de Jeanne de Navarre, devient Louis X dit le Hutin. Il est déjà roi de Navarre depuis le 4 avril 1305 où il a succédé à sa mère Jeanne de Navarre.

 
  Philippe IV Le Bel entouré de ses héritiers et de ses légistes
 

1315 – Pour apaiser les révoltes périodiques des Normands, Louis X le Hutin reconnait la spécificité de la Normandie en conférant par un acte appelé « la charte aux Normands » certains droits et privilèges. Cette charte, signée par lui, est édictée en deux fois : le 19 mars 1315 à Vincennes, elle contient quatorze articles, en juillet 1315 à Crécy, elle contient vingt quatre articles.
1316Le 5 juin, Louis X le Hutin décède.
Le 14 novembre, naissance de Jean Ier le Posthume, fils de Louis X et Clémence de Hongrie, il meurt 5 jours plus tard le 19 novembre.
Le 19 novembre, Philippe, second fils de Philippe IV et Jeanne de Navarre, âgé de 23 ans lui succède sous le nom de Philippe V dit le Long.
1322 Le 3 janvier, Philippe V dit le Long, atteint de dysenterie et de fièvre décède. Charles, fils de Philippe IV et Jeanne de Navarre, âgé de 28 ans succède à son frère sous le nom de Charles IV dit le Bel.
1328 –Le 1er février, Charles IV le Bel décède de maladie. Philippe de Valois, fils d’un frère cadet de Philippe le Bel lui succède à l’âge de 34 ans sous le nom de Philippe VI.
L’infidélité notoire de Marguerite de Bourgogne, l’ex-épouse de Louis X le Hutin, fait planer le risque de mettre sur le trône une bâtarde, sa fille Jeanne, devenue reine de Navarre. En conclusion de longues discussions, les barons conviennent de recourir à la « loi salique » qui exclue les femmes de l’héritage des terres, donc du trône de France. Le Christ appelé à la rescousse aurait déclaré que « les femmes ne peuvent accéder au trône de France ». Une assemblée de barons, parmi les principaux seigneurs, choisit Philippe de Valois, âgé de 34 ans, fils d’un frère cadet de Philippe le Bel. Gros homme, plus très jeune, pas doué pour les armes, Henri III d’Angleterre en profite pour revendiquer le trône de France  qui lui revenait de droit selon lui de par sa mère Isabelle de France, fille de Philippe le Bel.
1331 – En avril, Henri III prête l’hommage-lige à Philippe VI.

Octroi de la charte aux Normands  

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